Le commerce mondial marque le pas sous l’effet de vents contraires de plus en plus puissants !
Aujourd’hui, il est impératif de développer le commerce africain pour doper la croissance et réduire la pauvreté
C’est le constat d’une étude de la banque mondiale selon laquelle même si les restrictions commerciales se sont multipliées ces dix dernières années, cette tendance est aujourd’hui amplifiée par les brusques augmentations des droits de douane et les mesures de rétorsion imposées par les grandes économies au cours des trois derniers mois.
Certaines de ces décisions ont depuis été suspendues et de nouvelles négociations sont en cours, mais les entreprises continuent de naviguer en eaux troubles, tandis que les incertitudes politiques restent vives, les chaînes d’approvisionnement sous tension et la menace de nouvelles barrières commerciales d’actualité. Dans quelle mesure les « vents contraires » vont-ils modifier la trajectoire de croissance des échanges commerciaux cette année et l’année prochaine ? Quels sont les principaux risques d’écueil à l’horizon ? La Banque mondiale a tenté de répondre à ces questions « tout en mettant en évidence ce qui, dans ce contexte difficile, pourrait permettre de tenir la barre ».
Selon les prévisions de l’Institution de Bretton Woods, la croissance des échanges internationaux connaîtra un net ralentissement cette année. Et cela principalement en raison des effets cumulés des hausses de droits de douane et de la montée des incertitudes entourant les politiques commerciales. Ce climat incertain a atteint son paroxysme à la suite de l’annonce en avril dernier du relèvement des tarifs douaniers par les États-Unis. Mais, il s’est quelque peu atténué depuis, avec l’annulation par l’administration américaine de certaines des mesures prévues et le lancement de négociations commerciales avec de nombreux pays.
Le ralentissement en cours est visible dans deux chiffres récents : la progression du volume des importations mondiales de marchandises en glissement annuel a été beaucoup plus faible en avril (+2,9 %) qu’au mois de mars (+6,7 %), tandis que les volumes d’importations des marchandises des États-Unis ont chuté de près de 20 % d’un mois sur l’autre.  Les indicateurs à haute fréquence confirment cet essoufflement généralisé… Les commandes sont tombées à leur plus bas niveau depuis 20 mois en avril et n’ont que faiblement repris en mai. En supposant que les tensions politiques s’atténuent et que les chaînes d’approvisionnement s’adaptent aux nouvelles surcharges douanières, les prévisions indiquent une légère remontée de la croissance du commerce mondial en 2026, à hauteur de 2,7 %. Elles restent néanmoins inférieures de 0,8 point de pourcentage au taux anticipé en janvier 2025.
Impact disproportionné sur les économies émergentes
Les perspectives de croissance des échanges varient considérablement d’un groupe de pays à l’autre, du fait de leurs diverses expositions aux mesures restrictives et aux incertitudes entourant les politiques commerciales. Si les barrières commerciales des économies avancées restent généralement inférieures à celles imposées par les économies en développement, près de 70 % des nouvelles restrictions aux échanges depuis 2022 ont été mises en place par des économies avancées. La multiplication des restrictions touche de manière disproportionnée les économies émergentes et en développement qui dépendent de ces marchés…
Malgré la montée des restrictions commerciales, de plus en plus de pays se tournent vers des accords régionaux. L’intégration régionale des économies émergentes et en développement vient compléter leur intégration dans le commerce mondial. Et ces liens peuvent agir comme des amortisseurs contre la fragmentation mondiale. Le commerce mondial avait fait preuve de résilience jusqu’ici, mais il est désormais en forte perte de vitesse. La montée des barrières commerciales et le climat d’incertitude persistante portent déjà atteinte aux économies en les exposant à de graves risques de détérioration.  Pourtant, les effets contrastés de cette conjoncture défavorable (et le regain de dynamisme observé dans la recherche ou l’élargissement d’accords commerciaux) montrent que des mesures bien ciblées peuvent aider à stabiliser la situation, amortir les coups portés au système commercial mondial et jeter les bases d’une reprise progressive.
A noter que, en 2025, le commerce en Afrique est stimulé par la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) et une croissance économique accélérée. Et cela malgré la persistance des défis structurels. Les secteurs numériques, des énergies renouvelables et des technologies, comme l’IA et l’IoT, sont en plein essor, attirant des investissements croissants. La Chine reste un partenaire commercial majeur, avec une augmentation des échanges bilatéraux, tandis que l’accord AGOA avec les États-Unis est en attente de son renouvellement.
À l’évidence, le commerce mondial a tiré la croissance économique pendant des décennies. Aujourd’hui, les décideurs politiques doivent agir avec détermination pour apaiser les tensions, faire avancer les négociations commerciales, réduire les restrictions, diversifier les chaînes d’approvisionnement et ouvrir de nouveaux marchés pour préserver ce puissant moteur de croissance et gérer la période de repli commercial qui s’annonce inexorable !
Kader Toé
Source : Le Matin
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